En 1984, Monique Haicault introduit dans l'un de ses articles le principe de la charge mentale ménagère. En 2017, la dessinatrice, blogueuse et féministe Emma repointait du doigt grâce à une magnifique BD la charge mentale que les femmes continuent de subir quotidiennement. Si vous ne l'avez pas vu passer, voici une vidéo de cette BD : https://www.youtube.com/watch?v=qjlrMZaA45Q
La charge mentale se définit par « le fait d’avoir en permanence dans un coin de la tête la préoccupation des tâches domestiques et éducatives même dans les moments où l’on n’est pas dans leur exécution. » Ce qu’on se rend vite compte c’est que le poids moral de la gestion du foyer pèse beaucoup plus lourd pour les femmes que pour les hommes. Malgré que les femmes en 2018 aient une activité professionnelle pour environ le 2 tiers d’entre elles, elles continuent d’accomplir la plupart des tâches, mais en plus à devoir tout planifier. Le sexisme sociétal est toujours existant malgré une amélioration ces 30 dernières années. Nous voyons encore les hommes accomplir les tâches dites physiques comme sortir les poubelles, tondre la pelouse, tandis que les femmes auront à la charge les tâches dites intellectuelles comme la planification des repas, le repassage, la cuisine. Si les hommes participent de plus en plus aux tâches ménagères, il n’en demeure pas moins que les femmes fournissent près des deux tiers de toutes les heures consacrées au ménage et aux soins des enfants.
En naviguant sur les réseaux sociaux et à lire les témoignages des femmes et des hommes, je constate que ce n’est pas les tâches à proprement dit qui dérange, mais de devoir penser à tout, de devoir rappeler aux hommes ce qu’ils doivent faire. Personnellement, je dois rappeler à mon monsieur de se rappeler de se rappeler ( j'aime de tout mon coeur mon homme soit dit en passant.)Les hommes reprochent aux femmes de ne pas leur demander d’aide, les femmes reprochent aux hommes de ne pas prendre l’initiative de le faire. Aussi, je constate un besoin plus urgent de faire certaines tâches pour les femmes, comparativement aux hommes qui peuvent remettre à plus tard les choses sans s’en soucier. De plus, j’ai remarqué une certaine satisfaction, une fierté personnelle de la part des femmes, de voir que le foyer familial fonctionne grâce à elles. De plus, plusieurs femmes reprochent aux hommes de ne pas faire les tâches aussi bien qu’elles.
Quelles sont les répercussions de cette charge mentale ? On constate une angoisse constante chez les femmes. Selon une enquête réalisée par Ipsos pour le Forum ELLE Active en 2015, 50% des mères d’un enfant de moins de 15 ans, se déclarent angoissées en cas de situations imprévues, amenées à perturber leur organisation quotidienne (problèmes de garde ou d’enfant malade). Comparativement à seulement 32% chez les hommes. De plus, que dire des tensions au sein du couple ? Les répercussions ne sont pas toutes psychologiques. Si cette charge est un poids sur le bien-être des femmes, elle se répercute également sur leur physique, comme l’explique Sébastien Gagnon, ostéopathe : « La majorité des femmes qui viennent me voir sont contractées au niveau de la nuque et des épaules, qui sont les zones d’accumulation du stress. La charge mentale est en partie responsable de ces tensions. »
Oui oui je vois déjà les hommes me répondre : « Alors là c’est tout faux ma Jinny, c’est moi qui fait pratiquement tout dans la maison. Ma madame est une grosse fainéante.» Oui tout à fait, je sais que c’est vrai, et que c'est surtout tout à fait possible, les inégalités ne sont pas dans tous les foyers, dans certains c’est les hommes qui ont eux-même cette charge. Et que dire des parents monoparentaux. Évidemment mon article se veut tout simplement de manière générale, et je m'adresse aux foyers concernés. De plus, il y a de l’amélioration depuis la publication de Monique Haicault, suffit de voir ce tableau de statistique canada ( qui doit être assez représentatif de la communauté francophone).
Source : Statistiques Canada
Enfin bon, je crois que l’image de la femme travailleuse et unique responsable du foyer est encore bien trop présente dans l’inconscient collectif. Tant qu’une profonde remise en question ne sera pas faite, il sera difficile pour les femmes de s’émanciper de cette charge mentale et, plus encore, d’être considérées à l’égal des hommes. Il y a de l'espoir, mais il y a encore du travail à faire.
Et vous mesdames, après avoir vu la BD de Emma, est-ce que vous vous reconnaissez, cela vous interpelle ? Vous messieurs pensez-vous que votre madame en fait trop, ou vous croyez que l'équité existe au sein de votre couple ?
Sources : https://www150.statcan.gc.ca/n1/fr/pub/89-652-x/89-652-x2017001-fra.pdf?st=zV2kq8Mv
https://www.huffingtonpost.fr/2018/02/08/charge-mentale-le-coup-de-gueule-tres-parlant-de-cette-blogueuse-australienne_a_23356548/
REITZER,Anna, Le poids d'être une femme, Reflet de société vol.26, p27.