Elle peut bien accepter de se prêter au jeu de la féminité, mais pas à n’importe quel prix. C’est dans le petit magasin bio en pleine expansion à côté de chez elle qu’elle ose choisir un essentiel de la féminité (selon elle) : un rouge à lèvres.
Ça l’écoeure de les tester directement sur ses babines : partager ces muqueuses avec des étrangères et des étrangers, ça lui fait craindre d’attraper des feux sauvages, la grippe A-H1N1 ou encore la fièvre jaune. Elle en aurait pour deux jours à être malade par effet placébo. Elle choisit donc de mettre toutes les couleurs de rouges à lèvres BIO sur son poignet gauche et de choisir à partir de là.
Elle cherche avec sincérité la couleur parfaite. Elle réfléchit autant qu’il est possible pour une non-initiée de le faire à ce sujet :
Non, ça, c’est trop pâle Non, ça, c’est trop orange Non, ça, c’est trop luisant Non, ça, c’est trop mauve Ça… Peut-être Non, ça, c’est trop foncé Ah, oui, ça
Voilà, le choix était fait. Elle demande à une conseillère pour être certaine de son choix. L’employée valide la couleur. Cependant, la dame était surtout spécialisée dans les produits de santé naturels. En tout cas, elle a pu certifier que le produit était bio et végane.
La principale intéressée passe à la caisse et retourne chez elle. Elle a encore un communiqué de presse à approuver et une entrevue à préparer. D’ailleurs, un attaché de presse l’a appelé trois fois depuis le début de sa recherche. Ça doit commencer à presser.
Rendue chez elle, entre deux appels et un suivi médiatique, elle essaie son achat. Elle en met une couche sur la lèvre du bas : la couleur n’apparaît pas, c’est juste un peu plus luisant. Elle en met quatre ou cinq couches : il ne se passe rien. Elle trace une ligne sur sa joue juste pour voir.
Elle a choisi la couleur naturelle de ses lèvres. Au moins maintenant, personne ne peut se plaindre qu’elle n’est pas maquillée.
PS: Elle admire les gens qui aiment le maquillage et qui sont bon dans cet art éphémère. C'est juste pas sont truc.